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— Tu n’es pas fait pour vivre seul… tu ne te connais pas à fond. Ce que je voudrais, c’est te voir entouré d’une famille comme Philippe…

Jacques se récria vivement :

— Comme Philippe !… Si vous l’aviez entendu aujourd’hui !

Mais il s’interrompit brusquement, se leva et alla s’appuyer au linteau de la fenêtre. Les confidences pénibles de Philippe ne lui appartenaient pas. Il réfléchit quelques secondes, les yeux fixés sur la nouvelle lune. Le mince croissant, très brillant, étreignait le vide, et Jacques, distrait, cherchait en vain à distinguer la rondeur du globe, tandis que des souvenirs amers qu’il ne voulait pas non plus trahir s’agitaient pêle-mêle, réveillés par la sollicitude maternelle.

Enfin, il vint se rasseoir auprès de sa mère et dit simplement :

— Figurez-vous, mère, que Lucien a quitté la maison de Philippe. Il est parti hier pour Marseille. Je ne sais pas pourquoi il n’est pas venu nous dire adieu. Peut-être, au dernier moment, n’aura-t-il pas eu le temps.

Mme Isolant garda le silence.

Très souvent, lorsque le jeune garçon gau-