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En même temps, il enveloppa d’un coup d’œil aigu la silhouette élancée de Lucien, la figure intelligente où le masque craintif se devinait encore, et quelque chose de l’amertume intense qu’il avait éprouvée jusque-là en pensant à ce rival heureux se fondit. Il articula lentement :

— Comme les années vous ont changé, Lucien ! Vous voilà un homme fait.

Au bout d’un instant il ajouta avec effort :

— C’est à peine si je vous ai aperçu depuis votre arrivée. J’ai si peu de temps libre, moi ; mais pourquoi donc n’êtes-vous pas venu voir ma mère ?

— Vous ne m’y aviez pas engagé et j’ai craint d’être importun, mais je viendrai avec joie, puisque vous me le permettez. Jamais je n’ai oublié ce que vous avez été pour moi autrefois, monsieur Isolant.

Quelques minutes plus tard, Isabelle et Jacques se trouvaient seuls. D’un geste instinctif, Isabelle avait ramassé les plis de sa jupe et elle allait devant elle, les yeux baissés, écoutant le va-et-vient précipité de son sang. Entre elle et ses aspirations, si claires aujourd’hui, il y avait Jacques !

Ils marchèrent un moment le long du sen-