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Tout en parlant, il se dirigeait vers la porte. Philippe le suivait :

— Non, laisse-moi m’en aller seul maintenant… je reviendrai plus tard… tout à l’heure.

Dès qu’il fut dehors, il s’en alla droit du côté de l’étang. Il connaissait la prédilection d’Isabelle pour ce coin sauvage. C’était là qu’elle le ramenait tous les jours sous la poussée de ses souvenirs d’enfant. L’eau lisse, prisonnière dans son cadre de verdure roussie, luisait sans un frisson, mais, à son approche, entre les feuilles plates des nénuphars, des grenouilles effrayées disparurent avec un clapotis d’eau remuée. Tout à l’entour, les allées étaient désertes et le silence des grandes solitudes pesait sur la campagne.

Il revint sur ses pas, suivant le chemin que naguère il avait parcouru à côté d’Isabelle. Ce jour-là, tout ce qu’une existence d’homme peut offrir de joie avait miroité une dernière fois sous ses yeux, puis le mirage s’était éteint et la nuit l’avait environné de nouveau. Elle l’étreignait dans son pesant manteau. Elle l’étouffait.

Bientôt la masse carrée de la maison reparut au bout de l’avenue, et au même instant