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comme vous le faites, Isabelle. Aujourd’hui qu’on n’y peut rien changer, il faut l’oublier comme s’il n’avait jamais existé.

Elle fit quelques pas, les yeux baissés, puis elle dit, tendue :

— Pourquoi me dites-vous cela, aujourd’hui ? Vous me trompez, vous savez quelque chose.

— Non, je ne sais rien de ce que vous vous imaginez, mais ce que je sais, ce que je vois, c’est que depuis des années vous vous rongez d’inutiles regrets et que, sans aucun profit pour personne, vous torturez votre père. Regardez-le.

Elle tourna vivement son visage blanc du côté de Philippe. Silencieux, vieilli, lassé, il marchait un peu courbé à côté de Germaine. Elle dit d’une voix basse :

— Je ne peux pas faire autrement. C’est comme une chaîne qui me tient ; je ne puis pas la briser.

Son animation un peu factice était tombée. Toutes les lignes tristes de son visage avaient repris leur place, et elle continuait de regarder son père comme si elle ne voyait plus que lui. Jamais elle n’avait perçu si clairement les flétrissures du visage et le changement de l’allure. Tout à coup, elle quitta le bras de