Page:Pradez - Réparation, 1905.djvu/106

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 106 —

Des flaques, restées prises entre des rocailles, étoilaient la plage de mares sanglantes et de grands rocs noirs accompagnaient la courbe gracieuse de la côte, la hérissaient de pointes, de saillies, d’écueils, Sur le sommet des falaises abruptes, l’herbe des sables, maigre et chétive, jetait un tapis de verdure roussâtre.

Toutes les années, lorsque venaient les chaleurs suffocantes de juillet, Isabelle, que sa croissance rapide avait anémiée, prenait des pâleurs inquiétantes. Philippe l’emmenait aussitôt loin de la plaine brûlante où le sol saturé d’eau exhalait une atmosphère humide et malsaine. Il la conduisait tantôt ici, tantôt là, le long des côtes vertes et salubres de la Normandie. Jamais, bien que l’océan fût tout près d’eux, ils n’allaient le chercher dans leur patrie d’adoption.

Sur le bout de plage que la mer venait d’abandonner, des bandes d’enfants folâtres, jambes nues, criaient à tue-tête. C’étaient des rires, des gambades, des appels, un croisement d’idées et de volontés, un vacarme assourdissant, que le bruit continu de la mer avalait en grondant.

Dans la distance, une flotille de barques, aux voiles gonflées, glissait, comme un vol d’oi-