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désirait à l’exclusion de tout le reste. Il ne partagerait jamais plus la passion unique et violente qui la possédait, et jamais il ne lui dirait le mot qui la ferait rentrer triomphante dans l’ancien cadre de leur vie. Tant que Germaine n’aurait pas accepté son sort les yeux ouverts comme lui-même acceptait le sien, de leurs plus légers contacts, de chacune de leurs paroles la même mésintelligence irritante surgirait.

La jeune femme l’avait rejoint près de la fenêtre et son œil douloureux s’attachait à lui avec une fixité suppliante. Elle l’interpella enfin :

— Philippe !… Dites-moi au moins… ce que j’ai fait… ce que vous me reprochez…

Il l’interrompit froidement :

— Ne me faites pas toujours cette même question, Germaine ; c’est irritant, à la fin ! Je n’ai rien à vous reprocher. Mais ce que je ne comprends pas, c’est qu’après avoir soigné cet enfant comme la prunelle de votre œil pendant des années, vous l’ayez laissé partir sans dire un mot pour le défendre !

Germaine se tut, glacée. La barrière dressée entre sa passion et la réalité s’élevait devant elle, comme un infranchissable mur de pierre.