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vivre à paris

Un jour, il y avait environ trois semaines de cela, en se regardant au vol comme d’habitude dans les glaces pleines de lumière, Micheline aperçut sur sa joue droite une petite tache rouge inaccoutumée. Deux ou trois fois, ce jour-là, les habitués de la salle l’arrachèrent à d’insolites stations devant la glace où, de tout près, son souffle jetant sur le verre une fugitive vapeur, elle s’oubliait à considérer cette rougeur dont le centre accusait une légère enflure. À plusieurs reprises elle la frotta avec son mouchoir de poche, impatientée, et bientôt, tandis que sa joue gauche gardait sa pâleur froide de camélia, la droite se couvrit d’un rouge éclatant.

Le soir de ce jour-là, lorsqu’elle se retrouva seule enfin dans sa chambre louée au mois, vite, vite elle appliqua sur cette joue en feu une compresse d’eau glacée et elle s’endormit promptement pour faire avancer le temps, bercée de l’espoir que six heures de bon sommeil, avec cette compresse mouillée, rafraîchiraient suffisamment sa peau pour en chasser toute irritation. De minuit à six heures elle dormit tout d’un somme, mais tout de suite, en ouvrant les yeux, elle sentit, sous la compresse desséchée, la brûlure de la veille avivée par l’application du linge durci. Bon gré mal gré il fallait supporter cette petite misère qui allait l’enlaidir pendant plusieurs jours, il fallait se résigner et prendre patience !

Deux semaines entières s’écoulèrent sans amener de changement sensible, bien que Micheline, pour activer