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fausse route


II


Le soir où, après avoir fermé les yeux à Valentin Maubraz, Suzanne avait ramené chez elle, pour la nuit, le fils de son ancien fiancé, orphelin de père et de mère, elle avait obéi à un mouvement de pitié, sans s’imaginer un moment que cet acte si simple représentait pour elle le début d’une nouvelle existence, et qu’elle allait rester, presque sans avoir voix au chapitre, chargée de l’enfant de Valentin et de Victorine. Tout cela s’était arrangé pour elle sans qu’elle s’en mêlât.

À l’heure de la mort, Valentin n’avait appelé qu’elle à son chevet, et elle s’était trouvée seule auprès du moribond avec Michel, rappelé en toute hâte du séminaire où il se préparait à la prêtrise vocation choisie pour lui par son père longtemps avant qu’il eût l’âge de discuter cette décision. Pourquoi Valentin avait-il fait de son fils unique, seul dépositaire de son nom, un prêtre, contrairement à la tradition de sa famille ? Pourquoi ne lui avait-il pas permis d’être, comme lui, un simple paysan, paysan propriétaire, libre de ses