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les ignorés

Catherine ébaucha un geste de surprise ; elle s’écria :

— Ah !

Mais il lui fut absolument impossible de rien ajouter.

— Une fille de par là, poursuivit Jérôme. Ca n’a pas le sou non plus. Mais Jules aura vingt-trois ans à la mi-janvier. Je n’ai rien à dire. Il est libre.

Et comme Catherine continuait de se taire, il ajouta :

— Tu as raison, il n’a pas le cœur mauvais ce garçon. C’est la langue qui l’entraîne. On le monte facilement et il ne sait rien garder pour lui.

Il y eut un moment de silence. Catherine approuvait de la tête.

Tout à coup repoussant le chien du pied, Jérôme se leva. Sa physionomie s’était éclairée. Il revint à Catherine :

— Dis-moi ce qui en est, toi-même, Catherine. Tu sais bien que je t’aime plus que tout au monde. Est-il vrai que ton père est libre et que tu l’as revu ?

Cette fois Catherine eut un sursaut de véritable stupeur. Elle entrevoyait une trame de mensonges si serrée qu’elle ne pourrait peut-être plus y échapper. Elle interrogea, à son tour, tremblante :

— C’est Jules qui t’a dit ça ?

— C’est un bruit qui court, il me l’a rapporté.

Il ajouta la voix brève, les dents serrées, l’œil sombre :

— Il n’y reviendra plus, sois tranquille.

Mais tout de suite, son visage reprit son air soulagé, il continua :