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— Ton enfant !

D’un mouvement brusque, instinctif, la mère tendit les bras pour saisir Élisabeth, l’attirer à elle… mais elle reprit assez vite conscience de la réalité pour corriger aussitôt son geste.

Jamais l’amour filial ne brillerait pour elle sur le visage souffreteux d’Élisabeth, jamais, jamais.

De la joie pleine de promesses qui venait de miroiter à ses yeux, elle n’aurait que ce que sa fille lui en jetterait par pitié, pour satisfaire ce froid désir de gratitude issu tardivement de l’amère défaite de son orgueil.

— Il ne saura jamais rien de nos luttes, poursuivit Élisabeth persuasive. Il sera à toi autant qu’à moi. C’est pour lui que nous travaillerons toutes les deux. Le passé lui restera caché, et il t’appartiendra autant qu’à moi.

La mère considéra un moment en silence la figure pâle, aux traits irréguliers, qui lui rappelait d’une façon si brutale le roman désolé de sa jeunesse.