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charité tels que la fiction les y représente, et des mœurs aussi pures qu’on les suppose aux habitants, il ne leur manquait que les idées de religion plus justes pour en faire des gens très-agréables au ciel[1]. »

Après six années d’exil environ, Prévost eut la permission de rentrer en France sous l’habit ecclésiastique séculier. Le cardinal de Bissy, qui l’avait connu à Saint-Germain, et le prince de Conti le protégèrent efficacement ; ce dernier le nomma son aumônier. Ainsi rétabli dans la vie paisible, et désormais au-dessus du besoin, Prévost, jeune encore, partagea son temps entre la composition de nombreux ouvrages et les soins de la société brillante où il se délassait. Le travail d’écrire lui était devenu si familier, que ce n’en était plus un pour lui : il pouvait à la fois laisser courir sa plume et suivre une conversation. Nous devons dire que les écrits volumineux dont est remplie la dernière moitié de sa carrière se ressentent de cette facilité extrême dégénérée en habitude. Que ce soit une compilation, un roman, une traduction de Richardson, de Hume ou de Cicéron, qu’il entreprenne ; que ce soit une Histoire de Guillaume le Conquérant ou une Histoire des Voyages, c’est le même style agréable, mais fluidement monotone, qui court toujours et trop vite pour se teindre de la variété des sujets. Toute différence s’efface, toute inégalité se nivelle, tout relief se polit et se fond dans cette veine rapide d’une invariable élégance. Nous ne signalerons, entre les productions dernières de sa prolixité, que l’Histoire d’une Grecque moderne, joli roman dont l’idée est aussi délicate qu’indéterminée. Une jeune Grecque d’abord

  1. On peut lire à ce sujet une gracieuse lettre de Mademoiselle, cousine de Louis XIV, à Mme de Motteville, où elle trace à son tour un plan de solitude divertissante qui se ressent également de l’Astrée, et qui d’ailleurs fait un parfait pendant à l’idéal de Prévost d’après Cassiodure, par un couvent de carmélites qu’elle exige dans le voisinage