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l’hôtel, et à réparer tellement les diminutions de cette somme, qu’elle l’eût toujours devant elle en argent comptant. Le jour de l’inauguration n’était pas reculé trop loin. Il ne lui en demandait que deux pour les préparatifs, et il lui marquait le nom de la rue et de l’hôtel où il lui promettait de l’attendre l’après-midi du second jour, si elle pouvait se dérober de mes mains. C’était l’unique point sur lequel il la conjurait de le tirer d’inquiétude ; il paraissait sûr de tout le reste ; mais il ajoutait que, si elle prévoyait de la difficulté à m’échapper, il trouverait le moyen de rendre sa fuite aisée.

G*** M*** était plus fin que son père. Il voulait tenir sa proie avant que de compter ses espèces. Nous délibérâmes sur la conduite que Manon avait à tenir. Je fis encore des efforts pour lui ôter cette entreprise de la tête, et je lui en représentai tous les dangers ; rien ne fut capable d’ébranler sa résolution.

Elle fit une courte réponse à G*** M***, pour l’assurer qu’elle ne trouverait pas de difficulté à se rendre à Paris le jour marqué, et qu’il pouvait l’attendre avec certitude.

Nous réglâmes ensuite que je partirais sur-le-champ pour aller louer un nouveau logement dans quelque village de l’autre côté de Paris, et que je transporterais avec moi notre petit équipage ; que, le lendemain après-midi, qui était le temps de son assignation, elle se rendrait de bonne heure à Paris ; qu’après avoir reçu les présents de G*** M***, elle le prierait instamment de la conduire à la comédie ; qu’elle prendrait avec elle tout ce qu’elle pourrait