yeux et menée dans une retraite que j’ai horreur de nommer. Quel sort pour une créature toute charmante, qui eût occupé le premier trône du monde, si tous les hommes eussent eu mes yeux et mon cœur ! On ne l’y traita pas barbarement ; mais elle fut resserrée dans une étroite prison, seule et condamnée à remplir tous les jours une certaine tâche de travail, comme une condition nécessaire pour obtenir quelque dégoûtante nourriture. Je n’appris ce triste détail que longtemps après, lorsque j’eus essuyé moi-même plusieurs mois d’une rude et ennuyeuse pénitence.
Mes gardes ne m’ayant point averti non plus du lieu où ils avaient ordre de me conduire, je ne connus mon destin qu’à la porte de Saint-Lazare. J’aurais préféré la mort dans ce moment à l’état où je me crus près de tomber ; j’avais de terribles idées de cette maison. Ma frayeur augmenta lorsqu’en entrant les gardes visitèrent une seconde fois mes poches, pour s’assurer qu’il ne me restait ni armes ni moyen de défense.
Le supérieur parut à l’instant ; il était prévenu sur mon arrivée. Il me salua avec beaucoup de douceur. « Mon père, lui dis-je, point d’indignités ; je perdrai mille vies avant que d’en souffrir une. — Non, non, monsieur, me répondit-il ; vous prendrez une conduite sage, et nous serons contents l’un de l’autre. » Il me pria de monter dans une chambre haute. Je le suivis sans résistance. Les archers nous accompagnèrent jusqu’à la porte, et le supérieur, y étant entré, leur fit signe de se retirer.
« Je suis donc votre prisonnier ? lui dis-je. Hé