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me reste-t-il que de lui obéir et de lui plaire ? »

Il en fallait bien moins pour me faire renfermer tous mes reproches, et pour me faire repentir même de les avoir exprimés trop librement. Je crus pénétrer tout d’un coup le fond du mystère. Le comte aimait Théophé. M. de *** feignait d’aimer la veuve pour servir son ami, et Théophé écoutait le comte par complaisance pour sa gouvernante, à qui elle croyait rendre service en contribuant à la facilité de ses amours. Quel amas d’illusions ! Mais quel renouvellement d’estime ne sentis-je point pour Théophé, dans qui je croyais voir revivre toutes les perfections que je lui avais anciennement connues. Mes infirmités me rendaient crédules. J’embrassai l’aimable Théophé.

« Oui, lui dis-je, c’est de moi que vous devez vous plaindre. Je vous ai donné pour guide une folle, dont je conçois que les ridicules imaginations doivent vous gêner continuellement. Je parle de ce que j’ai vu. J’en suis témoin. Il ne me manquait que de pénétrer mieux vos dispositions pour vous rendre toute la justice que vous méritez. Mais n’allons pas plus loin. Je vous affranchis demain de cet incommode esclavage, et je vois d’ici une compagne qui conviendra bien mieux à vos inclinations. »

Il était nuit. J’étais en robe de chambre. Théophé avait toujours à mes yeux les char-