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d’observer ce qui se passerait dans un lieu si libre, mais de faire aux deux dames des reproches dont la sagesse même de leurs intentions ne devait pas les exempter.

Elles y étaient déjà avec leurs amants. Nous leur vîmes faire quelques tours de promenade, dans un lieu si découvert qu’il nous parut inutile de les suivre. Ce fut le soin du chevalier de choisir un poste où rien ne pût nous échapper pendant leur collation. Il voulait non seulement les voir, mais les entendre. Ayant su que le lieu où se faisaient les préparatifs était un cercle de verdure dans la partie supérieure du jardin, nous nous y rendîmes par de longs détours, et nous trouvâmes heureusement à nous placer derrière une charmille qui n’en était qu’à dix pas.

Ils arrivèrent peu de temps après nous. Leur marche était décente. Mais à peine furent-ils assis sur l’herbe que le prélude de leur fête fut un fort long badinage. Il commença par la veuve, et je m’aperçus tout d’un coup que les flatteries et les caresses des deux jeunes gens étaient autant de railleries qu’ils avaient concertées. Après cent fades compliments sur ses grâces, après l’avoir comparée aux nymphes, ils la parèrent d’herbes et de fleurs, et leur admiration parut redoubler en la voyant dans cette comique parure. Elle était sensible à leurs moindres éloges, et sa modestie lui faisant prendre un détour pour exprimer la satisfaction qu’elle en res-