Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome II.djvu/176

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tout le mérite que je lui attribuais, et ne m’en croyaient que plus attaché par l’amour à une jeune personne qu’ils ne s’imaginaient pas que je pusse avoir amenée de Turquie par d’autres motifs.

Ainsi tous s’accordaient, comme je l’avais prévu, à me croire mieux que je n’étais avec elle, et les distractions mêmes de mes affaires, qui me faisaient quelquefois passer trois jours sans la voir, ne purent leur ôter cette opinion.

Mais il y eut bien plus de variété et de bizarrerie dans les jugements du public. On la fit d’abord passer pour une esclave que j’avais achetée en Turquie, et dont j’étais devenu assez amoureux pour avoir apporté tous mes soins à son éducation.

Ce n’était pas s’écarter tout à fait de la vérité. Mais on ajoutait, et je trouvai moi-même aux Tuileries diverses personnes qui me racontèrent, sans me connaître, que le Grand Seigneur étant devenu amoureux de mon esclave sur le récit qu’on lui avait fait de ses charmes, me l’avait fait demander, et que c’était l’unique sujet de tous les différends que j’avais eus à Constantinople. Et comme le visage de Théophé, malgré tout ce qu’il avait conservé d’agrément, ne répondait plus à l’idée d’une femme qui s’était attiré tant d’admiration, on prétendait que pour me délivrer des tourments de la jalousie, j’avais défiguré une partie de ses charmes avec une eau que j’avais fait composer. D’autres pré-