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nir capable d’une faiblesse, j’aurais souhaité que ce n’eût point été comme au hasard, et sur le premier coup d’œil d’un inconnu. Ou pour découvrir tout le fond de mes sentiments, j’étais piqué que ces apparences de sagesse que j’avais respectées, se fussent sitôt démenties. Je rougissais même d’avoir été la dupe de ces belles maximes qui m’avaient été répétées tant de fois avec tant d’affection, et je me reprochais moins ma bonté que ma crédulité et ma faiblesse.

Avec beaucoup de confusion et de dépit, il se mêla tant de malignités dans ces réflexions que, loin d’interpréter favorablement la retenue où j’avais vu le comte auprès d’elle, je me sentis porté à croire que c’était le repos d’un amant satisfait, qui ne marquait peut-être d’empressement que parce qu’il avait déjà obtenu tout ce qui pouvait piquer ses désirs. Quels nouveaux transports cette pensée ne me fit-elle point éprouver ? Mais j’avais assez d’empire sur mes mouvements extérieurs pour ne rien entreprendre témérairement. Dans le dessein que je formai de surprendre la cruelle Théophé au milieu de ses plaisirs, je me ménageai un entretien avec sa suivante, moins pour lui faire des ouvertures que je ne voulais pas risquer légèrement que pour tirer d’elle-même celles que sa simplicité laisserait échapper. C’était une Grecque que j’avais substituée à Bema, et qui s’était engagée volontairement à mon service. Mais soit