Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome II.djvu/138

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gnait en France, que, surmontant toutes ses craintes, il vint me supplier de permettre du moins qu’il fît ses derniers adieux à sa sœur.

Cette qualité que le rusé Grec affecta de lui donner, et l’air de tendresse qu’il sut mettre dans ses instances, me déterminèrent non seulement à souffrir qu’il la vît sur-le-champ, mais à lui accorder plusieurs fois la même faveur jusqu’à notre départ. Les mesures que j’avais prises à la campagne et à la ville ne me laissaient rien à craindre pour la sûreté de ma maison, et je connaissais trop bien Théophé pour me défier d’elle. Cette facilité fit naître néanmoins de nouvelles espérances à Synèse. Il ne lui eut pas rendu quatre visites que, demandant la liberté de m’entretenir, il se jeta à mes pieds, pour me conjurer de reprendre pour lui mes anciens sentiments de bonté, et, prenant le ciel à témoin qu’il regarderait pendant toute sa vie Théophé comme sa sœur, il me proposa de le prendre avec moi, et de lui servir de père comme à elle.

La nature de sa prière, ses larmes, et la bonne opinion que j’avais eue de son caractère, m’auraient porté infailliblement à le satisfaire, si j’eusse pu me persuader que ce n’était pas l’amour qui se déguisait sous de trompeuses apparences. Je ne lui fis point de réponse positive. Je voulus consulter Théophé, que je soupçonnai d’être d’intelligence avec lui, et de s’être laissée tou-