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Synèse, je portai mes défiances beaucoup plus loin qu’elle, et je ne doutai presque point que sur son refus et sur le mien, ils ne fussent capables de renouveler tous les desseins dont le chevalier m’avait fait l’aveu lui-même. Cependant j’en fus d’autant moins alarmé que, devant la conduire à Constantinople, j’avais tout le temps de prendre des mesures, à l’avenir, pour lui faire un asile sûr de ma maison d’Oru.

Mais lorsque je m’entretenais le soir avec elle de toutes les circonstances qu’elle m’avait racontées, je reçus avis de mon secrétaire que le Grand Vizir Calaïli venait d’être déposé, et qu’on lui avait donné comme successeur Choruli, homme d’un caractère hautain, avec lequel je n’avais jamais eu de liaison. Je conçus tout d’un coup quel allait être mon embarras. Ce nouveau ministre pouvait arrêter ma fête, ne fût-ce que par le caprice qui porte ordinairement ses pareils à changer l’ordre qu’ils trouvent établi, et à révoquer toutes les permissions accordées par leurs prédécesseurs. Ma première pensée fut de feindre que j’ignorais ce changement, et de suivre les arrangements que j’avais pris en vertu du firman de Calaïli. Cependant les différends, dont j’étais sorti avec honneur, m’obligeant peut-être à garder plus de ménagements dans ma conduite, je pris enfin le parti de faire demander une autre permission au nouveau Vizir, et je dépêchai un homme exprès pour