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passion qu’il n’avait pu vaincre, il sentait, disait-il, que la bienséance ne lui permettait point de paraître devant moi sans avoir pressenti ma bonté, et il suppliait Théophé de la réveiller en sa faveur.

Je ne délibérai pas un moment sur ma réponse. Le cas était si différent du premier, et je me trouvai si peu de disposition à recevoir un homme qui violait mille devoirs à la fois dans ce nouvel enlèvement, que, dictant moi-même la lettre à Théophé, je déclarai au chevalier et à la compagne de sa fuite qu’ils ne devaient espérer de moi ni faveurs ni protection. Ils avaient pris assez de mesures pour s’en pouvoir passer, et leur but en venant droit à Constantinople était bien moins de me voir, que d’y rejoindre Synèse, à qui ils voulaient faire renaître leur ancien projet. Cependant comme ils avaient repris celui d’y faire entrer Théophé, et que l’étroite liaison qu’ils avaient eue avec elle leur faisait compter d’en être reçus avec joie, ils distinguèrent fort bien que sa réponse avait été dictée ; et loin de se rebuter d’un refus qu’ils n’attribuèrent qu’à moi, à peine furent-ils certains que j’étais à la ville qu’ils se rendirent tous deux à Oru.

Théophé, dans le premier embarras de cette visite, leur dit honnêtement qu’après avoir connu mes intentions, il ne lui était pas permis de consulter si son penchant lui faisait souhaiter de les voir, et qu’elle les suppliait de ne pas l’exposer au danger de