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j’appris d’un autre de mes gens qui revenait d’Oru, que le chevalier y était arrivé la veille, et que les nouvelles que Théophé lui avait communiquées l’avaient jeté dans un désespoir dont on appréhendait les suites. Il me fit néanmoins des excuses de la liberté qu’il avait prise de venir descendre chez moi, et il me priait de trouver bon qu’il s’y arrêtât quelques jours. Je le fis assurer sur-le-champ que je l’y verrais volontiers, et je ne fus pas plutôt libre que l’impatience d’apprendre ses sentiments et ses desseins me fit quitter la ville.

Je le trouvai dans toute la consternation qu’on m’avait représentée. Il me reprocha même d’avoir causé son malheur par la liberté que j’avais laissée à sa maîtresse de quitter ma maison, sans l’avoir informé, et je pardonnai ses reproches à la douleur d’un amant. Mais en peu de jours mes consolations et mes avis le ramenèrent à des idées plus justes. Je lui fis reconnaître que le parti que sa maîtresse avait pris, était ce qui pouvait arriver de plus heureux pour elle et pour lui-même, et je le disposai à profiter des secours que je lui offris pour faire sa paix avec sa famille et son ordre.

Étant devenu plus tranquille il nous raconta l’aventure de Synèse et la sienne, dont nous n’avions appris que les principales circonstances par sa lettre. Ils avaient fait ensemble le voyage de Raguse, et, n’ayant point trouvé d’obstacles au paiement des