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d’autres mesures sur la réponse de Théophé, qu’ils comptaient de trouver à leur retour. Tous les termes de cette lettre étaient si mesurés que Maria ne fit pas difficulté de nous la communiquer. Cette franchise me persuada du moins que je n’avais pas de mauvaise intention à lui reprocher. Elle n’avait pas attendu si longtemps à s’ouvrir à Théophé ; ou plutôt elle avait pressenti ses dispositions dès l’origine du projet, et, ne lui ayant trouvé de goût que pour les pays chrétiens, elle avait comme renoncé elle-même à ses espérances, après avoir appris la captivité de Synèse.

Mais se voyant rouvrir des voies qu’elle avait cru fermées, dont elle était continuellement témoin que je laissais Théophé maîtresse d’elle-même, elle était fort éloignée, en effet, de vouloir me déplaire, ou de soupçonner qu’elle pût m’affliger en me communiquant la lettre du chevalier.

Cependant, un mouvement de cœur, qui l’emporta tout d’un coup sur ma modération naturelle, me fit recevoir cette ouverture avec plus de ressentiment que je n’en devais marquer à une femme. Je traitai le projet d’établissement de partie de libertinage, qui répondait fort bien à la fausse démarche où Maria Rezati s’était engagée en fuyant de la maison de son père, mais qui ne pouvait être proposée sans honte à une fille aussi raisonnable que Théophé. J’allai jusqu’à donner le nom de trahison et d’ingratitude