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avait usurpé dans la maison, mais intéressé par cette raison à l’observer, s’était aperçu que l’eunuque du Sélictar, qui était venu prendre la jeune esclave, avait compté beaucoup d’or à l’intendant avant que de la recevoir de ses mains. Étant encore sans soupçon il lui avait parlé de ce qu’il avait vu, par la seule curiosité de savoir à quoi montait cette femme. Mais l’intendant, confus d’avoir été surpris, l’avait conjuré aussitôt de garder le silence, et lui avait fait un gros présent pour l’y engager. C’était déguiser au contraire l’envie que l’autre avait de le perdre. Ne doutant point qu’il ne se fût rendu coupable de quelque infidélité dont il craignait le châtiment, il avait découvert aussitôt ses conjectures au Bacha, qui n’avait pas eu de peine à pénétrer la vérité. L’intendant, pressé par les menaces de son maître, avait confessé que lorsque le Sélictar était venu proposer au Bacha de lui vendre la jeune Grecque, il avait entendu ces deux seigneurs disputer civilement sur le prix de sa rançon, et son maître protester, que se croyant trop heureux de pouvoir obliger son illustre ami, il était résolu de lui céder gratuitement son esclave. Ayant remarqué qu’ils s’étaient séparés sans avoir fini ce combat de politesse, il avait suivi le Sélictar, et lui avait dit, comme s’il eût été envoyé par le Bacha, que puisqu’il s’obstinait à ne pas recevoir l’esclave comme un présent, il en donnerait la valeur de mille écus. Il avait ajouté qu’il