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aucun droit de rien exiger d’elle, et que j’attendais au contraire qu’elle m’expliquât ses desseins. Je ne lui fis point de questions, et elle ne se hâta point de m’éclaircir. M’ayant remis sur l’article de nos femmes d’Europe, et sur les maximes dans lesquelles je lui avais dit qu’on les élevait, elle me fit entrer dans cent détails sur lesquels je pris plaisir à la satisfaire. La nuit était fort avancée, lorsque je m’aperçus qu’il était temps de se retirer. Ne m’ayant marqué aucune vue, et ses discours étant toujours retombés sur son bonheur, sur sa reconnaissance et sur la satisfaction qu’elle avait à m’entendre, je lui renouvelai, en la quittant, les offres de mes services, et je l’assurai qu’aussi longtemps qu’elle s’accommoderait de la maison et des soins de son hôte, elle n’y manquerait de rien. L’adieu qu’elle me fit, me parut extrêmement passionné. Elle me donna le nom de son maître, de son roi, de son père, et de tous les noms tendres qui sont familiers aux femmes d’Orient.

Après avoir expédié quelques affaires importantes, je ne pus me mettre au lit, sans me représenter toutes les circonstances de ma visite. Elles me revinrent même en songe. Je me trouvai plein de cette idée à mon réveil, et mon premier soin fut de faire demander au maître des langues, comment Théophé avait passé la nuit. Je ne me sentais point rappelé à elle par un penchant qui me causât de l’inquiétude ; mais ayant l’imagination