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forçant moi-même d’approuver sa résolution, elle était bien aise de marquer au Sélictar la reconnaissance qu’elle emportait pour ses bontés. Elle lui remit sa lettre, qu’elle venait de finir.

« Vous exécuterez d’autant mieux cette commission, ajouta-t-elle malicieusement, que vous en êtes déjà récompensé, et que le Sélictar ne pensera pas plus que moi à vous demander compte de ses présents. »

Je ne pus me dispenser de prendre occasion de ce discours pour faire quelques reproches à mon lâche confident. Il me jura, pour se justifier, qu’il n’avait pas cru donner atteinte à la fidélité qu’il me devait ; et me rappelant avec quelle franchise il m’avait confessé la part qu’il avait eue à l’absence de Théophé lorsqu’il s’était aperçu que j’en étais vivement affligé, il me supplia de juger du fond de ses sentiments par une si bonne preuve de leur sincérité. Mais je distinguais trop bien ce que je devais attribuer à la crainte qu’il avait de ma vengeance, et, renonçant à ses services, je le chargeai seulement de dire au Sélictar que je comptais de le voir incessamment.

En effet, je méditais déjà quelques moyens que je croyais infaillibles, pour me conserver l’amitié de ce seigneur malgré l’opposition de mes intérêts. Mais ma chaise s’étant fait entendre au même moment, je ne pensai plus qu’à prendre la main de Théophé pour l’y conduire. Je la serrai avec un mouve-