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point fait d’objection contre la possibilité de la retrouver. J’espérai que la nature triompherait de toutes les autres. Théophé me laissa voir quelque crainte.

« Ne ferais-je pas mieux, me dit-elle, de demeurer inconnue, et cachée même à toute la terre ? »

Je n’approfondissais point la cause de ces mouvements, et je la forçai presque malgré elle à m’accompagner.

Il était assez tard. J’avais passé seul une partie du jour chez le maître de langues, et m’accoutumant déjà à cet air de commerce dérobé, je m’y étais fait apporter à dîner par mon valet de chambre. Avant que j’eusse déterminé la jeune Grecque à sortir avec moi, la nuit avait commencé à s’approcher ; de sorte que l’obscurité se trouvait déjà épaisse, lorsque nous arrivâmes chez Condoidi. Il n’était pas revenu de la ville, où ses affaires l’avaient appelé dans l’après-midi ; mais un de ses domestiques, qui m’avait vu le matin, me dit qu’en l’attendant, je pouvais parler à ses trois fils. Loin de rejeter cette proposition, je la regardai comme ce que j’avais à souhaiter de plus heureux. Je me fis introduire avec Théophé, qui avait la tête couverte d’un voile. À peine eus-je fait connaître aux trois jeunes gens que j’avais rendu le même jour une visite à leur père, et que j’étais rappelé chez lui par le même sujet, qu’ils me parurent informés de ce qui m’amenait ; et celui que je pris à son air pour