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CHAPITRE III

LA FORGE DE L’ANNEAU


« Monsieur et Madame Wesendonk sont amicalement invités à venir déjeuner chez nous dimanche. R.S.V.P.

« Famille Wagner. »


Otto Wesendonk, négociant en soieries, d’origine rhénane était l’un des bourgeois les plus fortunés de la colonie allemande de Zurich. Établi depuis peu dans la vieille cité industrielle, ce compatriote des Wille et des Herwegh y représentait une grande firme de New-York, et il entra bientôt en relations avec le ménage Wagner par l’entremise de l’avocat Marshall von Biberstein, un réfugié politique qui avait combattu aux côtés du chef d’orchestre, sur les barricades de Dresde. Wesendonk était un homme de trente-sept ans, marié depuis quatre ans à peine avec la jolie Mathilde Luckemeyer, d’Elberfeld, qui en comptait vingt-quatre. Tous deux arrivaient d’Amérique et habitaient l’hôlel Baur au Lac. Ils aimaient la musique, fréquentaient les concerte. Ceux que Wagner venait d’y diriger leur laissèrent une impression durable. Assez vite, Richard se sentit en sympathie avec cet homme aimable, accueillant, et qui vivait dans un large confort. Et tout autant avec la jeune Mathilde, au beau visage romantique. « Une page blanche », disait-il d’elle. Même il ajoutait en riant : « C’est moi qui l’écrirai. » Et comme il gardait son goût d’enseiguer — et qu’elle avait celui