il tressaille de l’espérance d’un repentir possible, il aspire
à sa régénération et appelle la mort. Luttant corps à corps
avec la déesse qui a perdu son âme et qui le retient encore,
il se délivre soudain en invoquant Marie. L’enchantement
cesse. Le monde délirant du plaisir se referme sur l’évadé,
qui se réveille au pied des collines heureuses de son adolescence.
Après les tentations avortées de la jeunesse, les
voyages, l’exil, ayant jeté au vent les cendres de son amour
brûlé, le poëte respire ici l’air pur de la patrie intérieure
retrouvée. Le Vénushorg s’ensevelit dans son souvenir tandis
que se dresse au loin la forteresse familière de la Wartburg.
Un jeune pâtre célèbre sur son chalumeau le printemps qui
refleurit la terre. À distance, on entend un chœur : ce sont
des pèlerins qui vont à Rome pour obtenir l’absolution de
leurs péchés, en chantant les louanges de Jésus et de la
Vierge. Tannhaeuser demeure plongé dans une hébétude
dont il est tiré par l’irruption du landgrave de la Wartburg,
de ses barons et troubadours. Ils reconnaissent leur ancien
ami, lui font fête, l’interrogent. D’où vient-il donc après tant
d’années de mystérieux silence ? L’amant de l’amour ne s’explique
pas, mais il suit la troupe brillante jusqu’au château.
La nièce du landgrave, Élisabeth, y attend depuis sept ans le
retour du poëte qui éveilla jadis son cœur. Elle court à lui
radieuse et les bras déjâ tendus… Mais aucune promesse
n’est échangée entre ceux qui naguère commencèrent de s’aimer,
sinon ce seul regard de confiance et d’espoir que ne
trouble pas le désir. Lien profond et menacé, puisqu’il ne
fut point assez fort pour rendre sourd le chevalier Tannhaeuser
aux appels de Vénusberg. Car peut-être la plus âpre
des malédictions qui pèse sur l’homme est-elle l’affreuse
énergie qu’il met à vouloir embrasser dans un même souffle
ce qu’un seul corps ne lui apporte jamais : la grâce d’une
âme et les ardeurs de la chair.
Pour fêter le retour du voyageur, le landgrave ordonne un tournoi poétique dont le sujet sera la définition de l’amour, et Wolfram von Eschenbach engage aussitôt le combat. Il chante l’amour pur, respectueux, reposant dans la crainte de Dieu, la virginité inaccessible, « la fontaine merveilleuse qu’on n’ose approcher de peur de la ternir ». Mais déjà l’orchestre entier tremble sous l’incantation loin-