Page:Pour lire en traîneau - nouvelles entraînantes.pdf/64

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 34 —

— Et tenez, me dit mon ami en le retirant de sa poche, le voilà. En le regardant je vis une fente, faite avec un canif tranchant sur l’une des faces ; j’appuyais et en fis sortir une pièce de deux francs.

Mon ami bondit de joie.

— Cinquante sous donnés par les nationalistes, quelle aubaine ; jamais argent ne m’a fait tant plaisir ! Il solda les deux consommations, et voilà comment Déroulède m’a payé un verre sans le savoir !

Ainsi donc il y avait là des milliers de gens payés 2 fr. 50 chacun pour enlever le président Loubet. Ça représentait une belle somme et ça prouvait que les nationalistes puisaient à pleines mains dans la caisse de la congrégation !

J’ai tenu à conter ici cette histoire authentique, car c’est bien ainsi par ces petits côtés que l’on éclaire et que l’on écrit la véritable histoire.

Un autre jour, il y a longtemps, une troupe famélique d’émigrants étaient là, de braves Italiens partant en Amérique, et par hasard deux jeunes filles, deux enfants de quinze ans, parmi eux et parlant un peu le français m’abordèrent en pleurant pour me dire que le bureau de tabac qui est au milieu de la salle ne voulait pas leur changer une pièce de vingt francs pour acheter deux cigares d’un sou pour leur père, sous prétexte qu’elles étaient des sales étrangères ! Je priai les deux enfants de me suivre et je donnai la pièce de vingt francs au buraliste, qui, avec sa fille et sa fille, m’agonirent de sottises.