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aujourd’hui les filles publiques, privées de la liberté, — admirez cet euphémisme tout à la fois cruel et hypocrite — soit par suite de notification d’un jugement, ce qui devrait toujours être, soit par le simple effet de décisions administratives ! ce qui veut dire que la femme est considérée, en plein vingtième siècle, moins qu’une esclave et qu’au nom du bon plaisir et de l’arbitraire, on a le droit de la jeter en prison, sans jugement, en dehors de la justice. C’est simplement odieux et je crois qu’il est inutile d’insister sur un tel état de barbarie sociale. Du reste tous les moralistes et tous les sociologues sont d’accord sur ce point.

On pourrait déjà trouver immoral que le Préfet de Police ait le droit abusif de jeter les femmes en prison, sans jugement, pour son bon plaisir ; mais dans la pratique ce n’est même pas cela. Il n’opère pas lui-même, son autorité est forcément déléguée à des agents des mœurs, à M. Jules, à M. Alphonse, qui arrêtent les femmes au hasard, au petit bonheur si l’on peut dire, par bêtise quand ça n’est pas par vengeance ou par chantage. On peut donc affirmer hardiment qu’à ce point de vue, notre police des mœurs nous met au ban de la civilisation…

Mais je poursuis : sont encore enfermées dans la prison de Saint-Lazare, les filles mineures que leurs parents obtiennent d’y faire séjourner — toujours l’euphémisme — en correction et les femmes mariées condamnées pour adultère, ce qui est encore absurde, car, depuis la loi du divorce sur-