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sés sous le poids de la Société des cent kilos et souffraient amèrement de leur isolement et de leur petitesse ; seulement c’est l’occasion qui leur manquait pour secouer leur torpeur et se jeter spontanément dans les bras l’un de l’autre, dans un beau mouvement de solidarité humaine.

Or, précisément cette occasion vient de se produire dans des conditions assez tragiques pour réveiller les bonnes volontés les plus endormies et les plus disposées à flancher, comme l’on dit.

Jugez-en plutôt :

Dernièrement, à Lyon, les voyageurs qui se trouvaient en gare de Perrache, à l’arrivée du train express de Marseille, ont été les témoins d’un lamentable spectacle. Dans un compartiment réservé d’une voiture de deuxième classe se trouvait un soldat portant l’uniforme gris des disciplinaires, que deux infirmiers accompagnaient à Châlons-sur-Marne, où il doit être enfermé dans un asile d’aliénés.

Ce soldat, âgé de vingt ans, se nomme Émile Lasault. Son odyssée est lamentable. Lasault avait été incorporé au 3e bataillon d’infanterie légère d’Afrique, mais, s’étant rendu coupable du délit de destruction d’effets, il fut condamné par un conseil de guerre à la peine des travaux publics.

Il ne tarda pas à tomber malade et fut transporté à l’hôpital de Bizerte.

À dater de ce moment, c’est-à-dire depuis quinze mois, Lasault ne voulut plus avoir aucun rapport avec le reste des humains. Pas une fois