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IDYLLE SAPHIQUE

Des chuchotements, une porte qui s’ouvre doucement, doucement, comme si on guettait autour de la belle endormie :

— Ah ! tu es réveillée, ma Nhinon, bonjour !… et miss Florence entrait.

— Comment ? Toi ?… toi !… toi !… Et où as-tu dormi ?… Je ne sais plus ! Suis-je vraiment éveillée ? Il me semble que je rêve encore !… Ces bijoux ? Comment sont-ils venus là ? Et toi-même ?… Du jour ! De la vie ! Ernesta ! ouvrez, ouvrez !

Et, intriguée, Nhine tournait ses regards vers la clarté…

— Ah ! je devine !… C’était toi, Flossie, la dame qui avait acheté ces objets tant désirés. Ah ! que tu es gentille, mais, dis-moi : comment es-tu là ?

— C’est bien simple, ma douce reine, je suis rentrée chez moi très tard et j’en suis sortie très tôt. Les bijoux étaient ici hier soir et tu les as eus sur toi toute la nuit. Je suis si contente d’avoir pu te faire plaisir ! je suis récompensée, et au-delà, par ton joli sourire.

Elle était toute mignonne et menue. Son pardessus droit et long s’ouvrait sur une culotte noire, très courte, qui lui collait aux cuisses, une chemisette blanche et de forme masculine s’apercevait, couvrant son buste élégant et cambré, de grandes bottes jaunes lui coupaient le mollet, tandis que sur sa tête se campait fièrement un large feutre gris, se balançant sur sa chevelure argentée et rebelle.