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IDYLLE SAPHIQUE

venu, je lui ai parlé de ces objets, en lui manifestant mon désir de les avoir et il m’a refusé. Oui, ma Floss, tu vois comme je suis malheureuse ! Ainsi que le dit si justement Altesse, ma triste vie n’a de raison d’exister que si je satisfais tous mes caprices…

Et, navrée de sa petite déception, Nhine faisait la moue, plissant sa jolie bouche et fronçant le sourcil, ce qui lui donnait un air adorable de mutinerie et de révolte. Elle continuait :

— Aussi je boude, je souffre, je suis d’une humeur de chien. Il est vrai que tout dernièrement il m’a réglé une forte facture chez Callot et qu’il m’a apporté ce joli rang de perles noires fermé par un rubis. Eh bien, j’aurais préféré mon capillaire et ma sauterelle. Ah ! Moon-Beam, quelle désolation que mon esclavage ! Que je leur doive tout demander à ces hommes dont je suis la maîtresse, ô ironie ! Tout, depuis les innocents petits rubans de mes chemises jusqu’aux deux chevaux blancs que j’attelle à ma voiture !… Tiens, à ce propos, ils sont là… Allons nous promener, veux-tu, mignonne ? Ça me changera peut-être les idées !

— Tout ce que tu voudras, ma Nhine ! Mais ne sois pas morose pour une si petite chose !

— Une si petite chose ! Mais ma vie ne se compose que de celles-là ! Où en vois-tu de grandes ? Rien à faire, Flossie, que de me mettre de la poudre sur le nez, de m’onduler et de m’exhiber au public ainsi qu’une poupée. Tiens, je ne veux pas pen-