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IDYLLE SAPHIQUE

— Mais si, Nhine, mais si… Jusqu’alors, tu sais, je me suis adressée à des femmes qui n’étaient pas toi et qui lui permettaient ainsi qu’à moi l’accès facile de leur boudoir… je jouissais d’elles vite et le plus souvent sans lendemain. Écœurée, je revenais alors plus près de lui, pour repartir ensuite vers de nouvelles conquêtes… j’étais un vrai papillon. Une seule liaison — puisque je te dis tout — la dernière, avec une femme mariée, toute jeune, brune ravissante, ardente, dura un peu plus longtemps… il n’en fut pas jaloux, témoin discret, et en volupté satisfaite, de nos perversités… Cette liaison ne serait pas encore terminée… mais depuis que j’ai pu t’approcher, toi, la si belle et la si blonde, brusquement j’ai rompu. Jane — elle se nomme ainsi — ne m’a plus revue. Ils se consoleront ensemble !

Grisée par sa confidence, l’enfant se pressait contre Annhine, la respirait toute, soulevait le bas de sa robe et plongeait ses mains menues dans les froufroutants dessous de satins et de malines qui s’éparpillaient en neige parfumée, la couvrant presque, l’énervant.

— Finis, Flossie… tu sais bien que je ne veux pas, et tapant de ses petits pieds les mains hardies et fouilleuses de la mignonne, Nhine répéta :

— Tu sais bien ce qui est convenu… je ne veux pas… je ne veux pas.

Elle abattit sa robe et prit un air sévère :

— Allons, finis…