Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/63

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
53
IDYLLE SAPHIQUE

d’Hamlet est peut-être une chose peu durable : « Le parfum et la volupté d’une minute, rien de plus, ainsi réfléchissez, etc… » Aussi bien qu’à ses réponses à elle, on sent qu’elle n’est plus revêtue de la fragile armure de l’ignorance.

Hamlet n’est pas un état d’âme, une phase d’un type… mais une âme emblématique de tout ce qui se sent vivre. L’être varie… la faute générale est d’avoir un parti pris sur toutes choses… la bêtise le conçoit tel ou tel et l’habitude le fixe… Sarah nous dépeint l’esprit qu’elle incarne généralement, stable quoiqu’éphémère, fort, faible, paresseux, fervent, changeant enfin selon les événements, ce n’est pas un mannequin, un homme factice voulant prouver une morale quelconque… Elle nous montre bien clairement la sensibilité humaine et son œuvre. C’est splendide… Hamlet joue à talons sur tout… la voici… suivons bien… c’est la fin…

Alors que le spectacle s’achevait, elles s’éveillèrent comme d’un songe.

— Ah ! quel chef-d’œuvre et quelle admirable artiste, murmurait Annhine extasiée, j’en suis tout étourdie encore ! que c’est beau, ma petite ! Mais vite ! Sortons… Faufilons-nous dans tout ce monde et viens avec moi, tu te dissimuleras bien au fond du coupé, nous irons respirer l’air du Bois. Il fait sec et beau, le veux-tu ?

Et Nhine se hâtait, couvrant Flossie de son long manteau de drap, se revêtant elle-même de sa lourde