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IDYLLE SAPHIQUE

les flacons, les houppes et les fards propres à aviver l’éclat de sa beauté.

— Alors, viens, mon page, suis-moi ! Couche-toi là par terre, sur la tête du tigre et admire-moi à ton aise ! Raconte-moi ton histoire ! Dis-moi ton nom… ton petit nom.

— D’histoire, je n’en ai plus… j’abdique toute personnalité en cette heure bénie, je ne suis plus rien que ton page, le page d’Annhine de Lys… et ivre de joie, l’enfant rampait sur les épais tapis et sur les fourrures amoncelées. Oh ! ton petit pied nu ! Oh ! Nhinon… de te voir mon cœur bat, et elle colla sa bouche sur la chair provocante et rosée.

— Est-il gentil, mon page, Tesse, est-il gentil !…

S’abaissant, elle lui prit le menton et releva sa tête, puis elle l’examina, curieuse. Est-il gentil ! Oh ! les jolis yeux soulignés d’une cernure mauve… Oh ! oh ! jolis cheveux… on dirait un rayon de lune qui se serait posé là ! Dis-moi ton nom de baptême ?

— Mon nom de ?…

— Oui, ton nom de baptême, celui par lequel on t’appelle toujours !

— Ah ! oui, c’est : Emily.

— Oh ! il est affreux pour toi. J’ai eu autre fois une vilaine femme de chambre qui s’appelait ainsi, et elle m’a trahie.

— J’ai encore un autre nom : Florence… Flossie, par abréviation.