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IDYLLE SAPHIQUE

Tesse dit :

— Non, c’est une amie.

— Non, dit vivement l’enfant, plus encore. Annhine est tout pour moi, je l’adore !…

À un coup d’œil d’Altesse, le médecin comprit :

— Ah ! ça aussi lui serait fatal, je dois vous écarter de ma malade.

— Docteur !

— Mais oui, si vous l’aimez, vous devez tout désirer et tout faire pour sa guérison.

— Mais, docteur, je l’aime d’une façon dont vous ne pouvez vous douter.

— Ta ta ta !… son esprit fertile et détraqué travaille, s’engageant dans une voie qui l’entraînerait vers la folie, tout simplement. Non, madame, je ferai mon devoir.

Et, sans vouloir en entendre davantage, il s’éloigna avec Tesse, tandis que Flossie s’effondrait, remuée, en murmurant d’un accent désolé :

— Ah ! ces médecins à barbe, tous des brutes ! Ils ne pensent qu’à la santé du corps et négligent celle de l’âme ! Mais je serai plus forte qu’eux, ma faiblesse aura recours à la ruse, je déjouerai leurs complots contre nous. J’arriverai à elle, à mon but.

Tesse rentrait. Elles se contemplaient, muettes, comme après un désastre.

-— Vous restez, miss ?

— Non !… je pars… adieu, madame… vous me permettrez bien de venir prendre de ses nouvelles ?…