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IDYLLE SAPHIQUE

payé. À l’aspect d’une jolie petite grisette médiocrement mise, il lui enverra hardiment un : Tudieu ! la chouette môme !… ou quelque chose de ce genre, accompagné d’un baiser sonore.

— J’aime le peuple, dit Nhine.

— Il est brutal, peut-être, mais il est toujours franc.

— Et me voilà avec un soulier ! C’est drôle comme tout !… Au revoir, chérie, tu es chez toi, dors bien, je tâcherai de trouver autre chose, es-tu satisfaite ?

Tesse l’embrassa.

— Je suis si touchée de l’affection que tu me témoignes, mon cœur chéri. Ah ! je t’aime bien, va, à bientôt !…

En rentrant, Annhine stupéfaite crut avoir une hallucination, elle aperçut Maurice dans l’antichambre, c’était lui qui lui avait ouvert la porte. Il était ému, tremblant, honteux, il craignait de la mécontenter, mais il n’avait pas pu réprimer son désir de la voir cette nuit.

— Toute une nuit, songe donc !… Tu ne m’en veux pas, Nhine, je me suis sauvé de chez moi, j’ai pris mille précautions, et puis, tant pis, je me moque de ce qui pourra m’arriver demain, vois-tu ? Tu veux bien de moi ?… ah ! j’avais si peur ! Ta femme de chambre m’avait pourtant rassuré, me promettant que tu serais heureuse de trouver ton Momo ici, que tu rentrerais seule.

Il l’emportait dans ses bras, vers le boudoir. Elle