Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/252

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
242
IDYLLE SAPHIQUE

Princesse ne lui pardonnerait ça, bien sûr, jamais ! Sans rancune, Princesse se laissait embrasser, donnant des petits coups de langue à droite, à gauche, dans les cheveux, dans les oreilles, sur la voilette et les fourrures.

Dans la journée, Annhine repensa plusieurs fois à cette promenade du matin : Dire que j’avais oublié ma Princesse, c’est trop fort !

Le soir elle alla aux Folies-Bergère avec Altesse et des amis. Vers onze heures elle voulut rentrer, se sentant faible, nerveuse, lassée. Elle sortit la première de l’avant-scène et aperçut Maurice, anxieux, en attente derrière la petite porte. Elle ne le reconnaissait pas, il était mignon comme tout en habit… un vrai chérubin… l’air encore plus jeune. Elle lui tendit la main, lui faisant part de son impression en deux mots vite jetés. Il balbutia honteux et la regarda s’éloigner entourée d’une joyeuse bande d’amis. — Que fait-il donc là, ce petit, s’il est aussi peu libre qu’il le dit ?

— Je ne pense pas que ce soit votre famille qui vous envoie aux Folies-Bergère, lui dit-elle en l’accueillant le lendemain.

— Mais si, répondit-il, on m’avait permis de voir les luttes qui sont tout ce qu’il y a de plus intéressant, je vous ai aperçue, alors je me suis vite blotti derrière votre loge, guettant votre passage pour avoir un regard, un sourire, espérant une parole, ce qui est arrivé. J’en ai rêvé toute la nuit !…