Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/152

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
142
IDYLLE SAPHIQUE

— Quelle indignité !… Ah ! c’est infâme, Willy, ce que vous avez fait-là ! articula-t-elle enfin.

Et elle voulut passer.

Il l’écarta violemment et lui barra le chemin.

— Une infamie !… cria-t-il au paroxysme de la colère. Ah ! c’est une infamie que de chercher à vous faire toucher de près votre ignominie ! C’est infâme de vous faire voir à qui vous me préférez, moi, votre fiancé, votre amant ! C’est affreux de faire venir ici à prix d’or cette prostituée se livrer devant vous à son métier… afin de vous en dégoûter à tout jamais. Mais vous êtes donc une misérable ou une folle, Flossie, de vouloir vous avilir à ce point ! Je vous croyais aveugle, j’ai voulu vous ouvrir les yeux : la voilà, cette fameuse beauté, cette ordure ! elle s’est mise nue et sur mon ordre et pour de l’argent, en cette ignoble maison de passe ! Belle sa chair, oui… ah ! vous pouvez vous en saouler, mais me sacrifier, m’éloigner de vous pour cette saleté, pour cette fille qui se vend ainsi au premier venu, est-ce possible ?… est-ce seulement croyable ?…

Farouche, Flossie se redressa :

— Va-t’en, monstre… elle rugissait,… à tout jamais va-t’en ! Je te l’ordonne. Tout est rompu, tout est fini entre nous ! Va-t’en ou je me tue !

Elle ouvrit la fenêtre et posa son pied sur l’appui. Il se calma instantanément.

— Flossie, ma Flossie, ma fiancée, ma femme ! Oh ! pardonnez-moi !… Je deviens fou, Flossie ! Non,