Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/141

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
131
IDYLLE SAPHIQUE

taquines et enjouées, tendres parfois… On comprenait l’extase et la muette adoration de ces deux hommes qui leur faisaient face et répartie.

Vers la fin, Nhine devint silencieuse. Elle ferma les yeux un instant et sembla respirer avec effort.

Attentif, Henri lui dit :

— Qu’as-tu, Nhinon ? Tu as l’air de te trouver mal ?

— Oh ! ce n’est rien !… J’étouffe un peu… si on ouvrait la fenêtre pour un petit instant ?… Tu veux bien, Tesse ?

Il se précipita. Elle se laissa conduire au balcon. Une bouffée d’air frais la ranima.

— Ça va mieux, laisse-moi, va fumer. C’est cela, sans doute, qui m’aura fait du mal… toujours vos fidèles mauvaises habitudes !

Il jeta son cigare dans la rue :

— Ma chérie, tu n’avais qu’à me le dire plus tôt.

— Oh ! je sais bien !… Il faut toujours tout vous dire à vous… laisse-moi seule… je veux respirer à mon aise… Va-t’en, je te dis, tu m’oppresses…

Elle frappait du pied et le repoussait durement.

Il revint à la table, attristé :

— Je ne sais pas ce qu’elle a, elle m’a renvoyé…

— Nhine n’est pas bien, Henri,… et Tesse parlait bas… remarquez, elle est pâle et nerveuse depuis quelques jours… elle s’est un peu fatiguée, surmenée… sa dernière création du Prince Azur l’a éreintée…