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IDYLLE SAPHIQUE

Effectivement, ce soir-là, Annhine était adorablement belle. Elle portait une robe de mousseline bleue, très claire, légère comme une nuée ; sa taille se cambrait dans une ceinture d’or mat très haute et ajustée, émaillée de nénuphars d’une blancheur opaque, aux cœurs de velours, et de grandes fleurs d’eau mélangeant leurs tiges longues et verdâtres à celles humides et droites de frais glaïeuls roses. Une libellule aux ailes transparentes d’un ton glauque de jade formait la boucle. Au cou elle avait un splendide collier de diamants qui se terminait par un pendentif en forme de murène ocellée d’émeraudes. Ses doigts étincelaient sous les feux des pierreries. Par un caprice elle avait posé sur ses cheveux deux étroits rubans de satin bleu qui les fixaient à la grecque sur le dessus de la tête ; près de l’oreille elle avait simplement piqué une rose blanche.

Sur son conseil, Altesse s’était revêtue d’une robe très droite et très collante toute en guipure d’Irlande sur un dessous chair. Un bouquet d’orchidées, de mauves cattleyas, sur le côté, attachaient une draperie de mousseline blanche, et des chaînes, entremêlées de saphyrs, de diamants, de perles et d’opales descendaient, longues et brillantes, le long de la dentelle mate et ajourée. Rien n’était plus charmant que la vue de ces deux jolies femmes d’une élégance raffinée et exquise, avec leurs gestes gracieux, l’enchantement de leurs regards et de leurs sourires, assises à cette table fleurie, devisant doucement,