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IDYLLE SAPHIQUE

proies soumises au vice dévorant de Florence ! Qu’elle vous épargne, vous ! Je veux la voir… lui parler… nous serons trois aimées… unies par vous, petite fleur pâle et douce, beau lys de blancheur ayant grandi, superbe et radieux, sur le fumier de la vie. Pourriture que nous, hypocrites, fardées, voilées ! Que vous êtes donc moins coupable, vous, mignonne enfant qui n’avez personne pour vous soutenir et vous guider au travers des dangers, et qui succombez doucement et sans plaisir… pour vivre !… Et si belle avec ça ! Ah ! pauvre petite ! Tenez… un sentiment vient au fond de mon cœur lacéré, pantelant, ensanglanté, un sentiment d’affection douce et profonde pour vous et qui me fera peut-être oublier ! Voulez-vous, Nhine, voulez-vous d’une amie ? Voulez-vous des restes de mon cœur ?

— C’est cela… et Nhine souriait, conquise par la spontanéité et la vigueur des sensations qui précipitaient cette femme dans ses bras… dans sa vie… Ah ! que je vais être heureuse désormais !… Elle fermait les yeux, toute aux espoirs des futures délices. Nous trois… Jane, Flossie, Nhine… allez… allez la voir, qu’il n’y ait pas de jalousies entre nous, et revenez bientôt toutes deux… nous nous ferons mutuellement du bien, étant réciproquement à plaindre. Avec Altesse, j’aurai trois amies, et vous me serez tendres. Allez, Jane, rejoindre Flossie… ne songez plus au passé brutal et douloureusement menteur.