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IDYLLE SAPHIQUE

réfléchissant à je ne sais quoi ! Et avec ça si nerveuse ! Les nerfs lui mangeaient le sang.

— Mais ses amis ?

— Ah ! oui, ses amis ! Madame Altesse est la seule qui lui donne de bons conseils… tous ils l’entraînent par ci par là… en dîners, en soupers, au théâtre. Ils peuvent bien la payer, lui passer ses trente-six volontés, ils la tuent à petit feu. Madame est délicate, elle n’y tiendra pas longtemps, et si bonne avec ça… c’est bien dommage… et la brave fille secouait la tête.

— Ah ! la sortir de là, l’arracher à cette vie qui me la prendra… se disait Flossie en revenant vers elle… Je vais aviser et au plus tôt.

— Tiens, Moon-Beam, voici une invitation pour après-demain, un grand bal paré et masqué donné au Continental pour les artistes par quelques auteurs heureux. On fête trois « centièmes » à la fois. Tout Paris y sera, Sarah, Réjane, Granier, regarde !… et elle lui tendait un carton de teinte brique tout enluminé et imprimé de diverses couleurs :

— C’est joyeux, cette idée, poursuivait-elle, nous irons ensemble, puisque c’est sous le couvert du loup, n’est-ce pas ? On se déguisera, tu viendras t’habiller ici, rends-toi libre, nous dînerons avec nos costumes. Moi je serai en abbé, j’ai un travesti ravissant de velours violet tout brodé… et toi ? En garçon aussi, nous danserons mieux… Tu m’instruiras un peu et nous ferons la cour à toutes les femmes. Voyons, toi