« — Pardon, chef, réplique l’autre avec calme. Il faut d’abord faire respecter l’article 293 qui exige que les voitures à tampons fixes alternent entre les voitures à tampons à ressort. Puis, il y a tout le train à reformer, car aucun des tampons ne coïncide exactement avec son contraire, comme il est prescrit à l’article 236, lettre A. Les chaînes de sûreté manquent en partie à certaines voitures qu’il faudra par conséquent réparer, comme l’exige l’article 326, lettre B. De plus, la formation du train n’est pas faite comme il est prescrit, parce que les voitures pour…
« — Vous avez parfaitement raison, s’écrie le sous-chef de gare. Mais pour faire tout cela, il faut une journée !
« — Ce n’est que trop vrai, soupire le chef de train, goguenard. Mais, que vous importe ? une fois en route la responsabilité pèse toute sur moi. J’insiste donc pour que le règlement soit respecté… »
Finalement, un coup de sifflet annonce que la locomotive s’avance, s’arrêtant longuement à chaque aiguillage pour une longue discussion entre le mécanicien et l’aiguilleur. En arrivant sur la voie où notre train l’attend, le mécanicien s’arrête encore une fois avec prudence : avant d’aller plus loin et d’aborder la tête de son train, il veut savoir si les freins des voitures sont en bon état, s’il n’y a pas de lampistes ou d’autres agents sur les toits des wagons… Un accident est si vite arrivé ! Enfin, le mécanicien se déclare satisfait et il amène sa locomotive à l’amarrage.
Nous allons partir ?… Allons donc ! Le manomètre de la machine doit marquer 5 degrés et il en marque 4. D’habitude, on part quand même et la pression monte en route. Mais le règlement exige les 5 degrés au départ et notre mécanicien ne partirait pour rien au monde à 4, 9 dixièmes ce soir.
Nous finissons par démarrer avec une heure et demie de retard. Nous sortons de la gare avec une sage lenteur, sifflant à toutes les aiguilles, longeant