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suit la voie qui lui paraît la plus courte et la moins hérissée de difficultés. Il en est de lui comme des eaux qui, suivant la pente, vont à l’Océan, ici paisibles, là grondantes, selon qu’elles rencontrent peu ou prou d’obstacles. Certes, il va à la Révolution, malgré les entraves que les privilégiés accumulent sur sa route ; mais il y va avec des soubresauts et des hésitations qui sont la conséquence de son humeur paisible et de son désir d’éviter les solutions extrêmes. Aussi, lorsque la force populaire, brisant les obstacles qui s’opposent à elle, passe en ouragan révolutionnaire sur les vieilles sociétés, c’est qu’on ne lui a pas laissé d’autre moyen d’expansion. Il est, en effet, incontestable que, si cette force eut pu s’épanouir sans encombre, en vertu du principe du moindre effort, elle ne se fût pas extériorisée en actions violentes et se fût manifestée pacifiquement, majestueuse et calme. Le fleuve qui, dans une lenteur olympienne et irrésistible, roule paisiblement vers la mer n’est-il pas formé des mêmes molécules liquides qui, coulant en torrents au travers des vallées encaissées, emportaient furieusement les obstacles qui s’opposaient à leur cours ? Ainsi en est-il de la force populaire.


Illusion des Palliatifs.


Mais, de ce que le peuple ne recourt pas à la force par plaisir, il serait dangereux d’espérer suppléer à ce recours en usant de palliatifs d’essence parlementaire et démocratique. Il n’y a donc pas de mécanisme de votation — ni le référendum, ni tout autre procédé qui prétendrait dégager la dominante des desiderata populaires — grâce auquel on puisse escompter faire l’économie de mouvements révolutionnaires. Se bercer de semblables illusions, ce serait retomber dans les douloureuses expériences du passé, alors que les vertus miraculeuses attribuées au suffrage universel concentraient l’espoir général. Certes, il est plus commode de croire à la toute-puissance du suffrage universel, ou même du référendum, que de voir la réalité des choses : cela dispense d’agir — mais, par contre, cela ne rapproche pas de la libération économique.

En dernière analyse, il faut toujours en revenir à l’aboutissant inéluctable : le recours à la force !

Cependant, de ce qu’un quelconque procédé de votation, de référendum, etc., est inapte à révéler l’étendue et l’intensité de la conscience révolutionnaire, de même qu’à suppléer au recours à la force, il n’en faut pas conclure contre leur valeur relative. Le référendum, par exemple,