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preuve que le travailleur, après avoir lutté en qualité de producteur contre son patron, a négligé de se défendre en qualité de consommateur. Très souvent, c’est la passivité de l’acheteur à l’égard du commerçant, du locataire à l’égard du propriétaire, etc., qui permet aux propriétaires, commerçants, etc., de récupérer par des augmentations sur l’ouvrier, en tant que consommateur, le bénéfice des améliorations qu’il a acquises en tant que producteur.

Au surplus, l’irréfutable démonstration que le taux du salaire n’a pas pour inéluctable conséquence un renchérissement parallèle de la vie est faite dans les pays à courtes journées et à hauts salaires : La vie y est moins coûteuse et moins restreinte que dans les pays à longues journées et à bas salaires.


Le Salaire et le Coût de la Vie.


En Angleterre, aux États-Unis, en Australie, la durée quotidienne du travail est souvent de huit heures (neuf heures au plus), le repos hebdomadaire y est pratiqué, les salaires y sont plus élevés que chez nous. Malgré cela, la vie y est plus facile. D’abord, du fait qu’en six jours de travail, ou mieux en cinq et demi (le travail étant suspendu, dans la plupart des cas, l’après-midi du samedi) l’ouvrier gagne pour se suffire pendant les sept jours de la semaine ; ensuite parce que, en règle générale, le coût des choses nécessaires à l’existence y est moindre qu’en France, ou tout au moins à meilleur compte, relativement aux taux du salaire[1].

Ces constations infirment la « loi d’airain ». Elles l’infirment d’autant mieux qu’il est impossible de prétendre que

  1. Sur le dire d’observateurs superficiels, bien des personnes acceptent sans contrôle et répètent de même que « la vie est chère » aux pays cités ci-dessus. Ce qui est exact, c’est que les objets de luxe y sont très coûteux ; la vie de « relations » y est très onéreuse ; par contre, tout ce qui est de première nécessité y est à bon compte. D’ailleurs, ne sait-on pas que, des États-Unis, par exemple, nous arrivent du blé, des fruits, des conserves, des produits manufacturés, etc., qui (malgré la majoration que leur fait subir le coût du transport et aussi malgré les droits de douane) viennent concurrencer, sur notre marché, les produits similaires ? Il est donc bien évident que ces produits ne se vendent pas, aux États-Unis, à des prix supérieurs… Bien d’autres faits probants seraient à évoquer. Le cadre d’une brochure ne le permet pas.