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comment elles ont été faites
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pétuelles. Puis, après un admirable discours de M. Jaurès, qui rejetait sur la majorité opportuniste, sur la majorité du Panama et des lois d’affaires, la responsabilité première de cet anarchisme qu’elle venait si férocement réprimer, qui accusait les financiers et les concussionnaires d’avoir, les premiers, enseigné « aux jeunes gens à l’âme violente » le mépris de l’autorité, le mépris de la République et jusqu’au mépris de la mort, — après un dernier assaut de l’opposition demandant que la durée de cette loi d’exception, comme celle des lois d’exception allemandes, fût limitée d’avance par le législateur, et qu’on n’inscrivit pas à titre définitif de semblables textes dans nos codes, après ces derniers efforts, 269 députés contre 163 et 96 abstentions votèrent l’ensemble du projet de loi.

Elle fut portée au Sénat le jour même. M. Trarieux, rapporteur, en exposa les dispositions principales et le Sénat, malgré les efforts de M. de Verninac, ordonna la discussion immédiate. M. Floquet, dont on avait annoncé à grand bruit l’intervention, commença un discours ; mais déjà malade, il dut s’interrompre presque aussitôt. Ce fut sa dernière apparition à la tribune. MM. Arago et Girault, et même M. Bérenger, protestèrent en quelques mots. Puis on passa au vote. 203 voix contre 34 adoptèrent la loi.


VII. — Ce scrutin est sans intérêt. Mais les scrutins de la Chambre, au contraire, sont pleins d’utiles enseignements. Une partie des radicaux, et par exemple MM. Goblet, Brisson, Doumer, Pelletan repoussèrent l’ensemble de la loi dont ils avaient d’ailleurs repoussé un à un chaque article. La droite pure vota contre, avec MM. Cochin et de Ramel, ou s’abstint, avec MM. de Lanjuinais et Balsan. Je ne dirai rien des ralliés et des opportunistes : leur zèle n’avait pas faibli. MM. Méline, Barthou, Ribot et Deschanel votèrent comme on peut imaginer qu’ils aient voté. M. Léon Bourgeois et ses amis, après avoir voté contre le changement de juridiction consacré par l’article 1er et pour divers amendements, tel que celui de M. Boissy-d’Anglas (qui tendait à limiter la durée de la loi), en adoptèrent cependant l’ensemble. Cette attitude conduirait