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s’arrêta devant le perron. Un laquais à la livrée impériale entra dans la chambre, annonçant que l’impératrice daignait mander en sa présence la fille du capitaine Mironoff.

Anna Vlassievna fut toute bouleversée par cette nouvelle.

« Ah ! Mon Dieu, s’écria-t-elle, l’impératrice vous demande à la cour. Comment donc a-t-elle su votre arrivée ? et comment vous présenterez-vous à l’impératrice, ma petite mère ? Je crois que vous ne savez même pas marcher à la mode de la cour. Je devrais vous conduire ; ou ne faudrait-il pas envoyer chercher la fripière, pour qu’elle vous prêtât sa robe jaune à falbalas ? »

Mais le laquais déclara que l’impératrice voulait que Marie Ivanovna vint seule et dans le costume où on la trouverait. Il n’y avait qu’à obéir, et Marie Ivanovna partit.

Elle pressentait que notre destinée allait s’accomplir ; son cœur battait avec violence. Au bout de quelques instants le carrosse s’arrêta devant le palais, et Marie, après avoir traversé une longue suite d’appartements vides et somptueux, fut enfin introduite dans le boudoir de l’impératrice. Quelques seigneurs, qui entouraient leur souveraine, ouvrirent respectueusement passage à la jeune fille. L’impératrice, dans laquelle Marie reconnut la dame du jardin, lui dit gracieusement :

« Je suis enchantée de pouvoir exaucer votre prière. J’ai fait tout régler, convaincue de l’innocence de votre fiancé. Voilà une lettre que vous remettrez à votre futur beau-père. »

Marie, tout en larmes, tomba aux genoux de l’impératrice, qui la releva et la baisa sur le front.

« Je sais, dit-elle, que vous n’êtes pas riche, mais j’ai une dette à acquitter envers la fille du capitaine Mironoff. Soyez tranquille sur votre avenir. »

Après avoir comblé de caresses la pauvre orpheline, l’impératrice la