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succès contre la cavalerie volante de l’ennemi. L’artillerie tonnait vainement du haut des remparts, et, dans la campagne, elle ne pouvait avancer à cause de la faiblesse des chevaux exténués. Voilà quelle était notre façon de faire la guerre, et voilà ce que les employés d’Orenbourg appelaient prudence et prévoyance.

Un jour que nous avions réussi à dissiper et à chasser devant nous une troupe assez nombreuse, j’atteignis un Cosaque resté en arrière, et j’allais le frapper de mon sabre turc, lorsqu’il ôta son bonnet, et s’écria :

« Bonjour, Piôtr Andréitch ; comment va votre santé ? »

Je reconnus notre ouriadnik. Je ne saurais dire combien je fus content de le voir.

« Bonjour, Maximitch, lui dis-je ; y a-t-il longtemps que tu as quitté Bélogorsk ?

– Il n’y a pas longtemps, mon petit père Piôtr Andréitch ; je ne suis revenu qu’hier. J’ai une lettre pour vous.

– Où est-elle ? m’écriai-je tout transporté.

– Avec moi, répondit Maximitch en mettant la main dans son sein. J’ai promis à Palachka de tacher de vous la remettre. »

Il me présenta un papier plié, et partit aussitôt au galop. Je l’ouvris, et lus avec agitation les lignes suivantes :


« Dieu a voulu me priver tout à coup de mon père et de ma mère. Je n’ai plus sur la terre ni parents ni protecteurs. J’ai recours à vous, parce que je sais que vous m’avez toujours voulu du bien, et que vous êtes toujours prêt à secourir ceux qui souffrent. Je prie Dieu que cette lettre puisse parvenir jusqu’à vous. Maximitch m’a promis de vous la faire parvenir. Palachka a ouï dire aussi à Maximitch qu’il vous voit souvent de loin dans les sorties, et que vous ne vous ménagez pas, sans penser à ceux qui prient